iMadrassa
Évaluation 2

La Peur

Le narrateur de cette histoire a loué une petite maison au bord de la Seine. Là, il fait la connaissance d’un vieux canotier qui lui raconte sa vie nautique. Une nuit, fatigué, le canotier jette l’ancre.

Soudain, un petit coup sonna contre mon bordage

. Je fis un soubresaut
et une sueur froide me glaça des pieds à la tête. Ce bruit venait sans doute de quelque bout de bois entraîné par le courant, mais cela avait suffi et je me sentais envahi de nouveau par une étrange agitation nerveuse. Je saisis ma chaîne et je me raidis dans un effort désespéré. L'ancre tint bon. Je me rassis épuisé.


Cependant, la rivière s'était peu à peu couverte d'un brouillard blanc très épais qui rampait sur l'eau fort bas, de sorte que, en me dressant debout, je ne voyais plus le fleuve, ni mes pieds, ni mon bateau, mais j'apercevais seulement les pointes des roseaux, puis, plus loin, la plaine toute pâle de la lumière de la lune, avec de grandes taches noires qui montaient dans le ciel, formées par des groupes de peupliers d'Italie. J'étais comme enseveli jusqu'à la ceinture dans une nappe de coton d'une blancheur singulière 

, et il me venait des imaginations fantastiques 
.


Je me figurais qu'on essayait de monter dans ma barque que je ne pouvais plus distinguer, et que la rivière, cachée par ce brouillard opaque, devait être pleine d'êtres étranges qui nageaient autour de moi. J'éprouvais un malaise horrible, j'avais les tempes serrées, mon cœur battait à m'étouffer, et, perdant la tête, je pensai à me sauver à la nage ; puis aussitôt cette idée me fit frissonner d'épouvante. Je me vis, perdu, allant à l'aventure dans cette brume épaisse, me débattant au milieu des herbes et des roseaux que je ne pourrais éviter, râlant de peur, ne voyant pas la berge, ne retrouvant plus mon bateau, et il me semblait que je me sentirais tiré par les pieds tout au fond de cette eau noire.
En effet, comme il m'eût fallu remonter le courant au moins pendant cinq cents mètres avant de trouver un point libre d'herbes et de joncs où je puisse prendre pied, il y avait pour moi neuf chances sur dix de ne pouvoir me diriger dans ce brouillard et de me noyer, quelque bon nageur que je fusse.
J'essayais de me raisonner : je me sentais la volonté bien ferme de ne point avoir peur, mais il y avait en moi autre chose que ma volonté, et cette autre chose avait peur. Je me demandai ce que je pouvais redouter ; mon moi brave railla 

mon moi poltron
, et jamais aussi bien que ce jour-là je ne saisis l'opposition des deux êtres qui sont en nous, l'un voulant, l'autre résistant, et chacun l'emportant tour à tour.
Cet effroi bête et inexplicable grandissait toujours et devenait de la terreur. Je demeurais immobile, les yeux ouverts, l'oreille tendue et attendant. Quoi ? Je n'en savais rien, mais ce devait être terrible.              

 

Extrait de « Sur l'eau » de Guy de Maupassant

Notes :

  1. Bordage : Les planches qui recouvrent la membrure du navire.
  2. Soubresaut : frisson, tressaillement.
  3. Singulière : bizarre, étonnante.
  4. Fantastiques : créées par l’imagination, qui n’existe pas dans la réalité.
  5. Railla : se moqua
  6. Poltron : lâche, peureux.
Compréhension de texte

Le cadre

  1. Quel est le statut du narrateur ? Justifie ta réponse en relevant deux indices au début et à la fin du texte.
  1. Où se trouve le narrateur et quand se déroule l’événement vécu. Justifiez votre réponse à l’aide d’indices relevés du texte.
  1. Dans les 2 premiers paragraphes, quels éléments commencent à rendre l’atmosphère inquiétante ? Pourquoi ?
  1. Quelle est la couleur dominante (2ème paragraphe) ? Relevez le champ lexical de cette couleur .

La montée de la peur

  1. « Soudain, un petit coup sonna contre mon bordage. »
  • Quelle est la classe grammaticale du mot « soudain » ?
  • À quel temps le verbe est-il conjugué ?
  • Qu’annoncent ces deux mots ?  
  1. Relevez dans chaque paragraphe les expressions qui traduisent la montée de la peur. 
  1. Quel événement est à l’origine de cette peur ? 
  1. « il me venait des imaginations fantastiques »

       Quel phénomène météorologique engendre ces imaginations ? Pourquoi ? 

  1. Quel risque pensait-il courir ? Relevez l’expression qui le traduit.

La narration 

  1. « Je me vis, perdu, allant à l'aventure dans cette brume épaisse,………. tout au fond de cette eau noire »

Ce passage correspond-il à une ellipse, une analepse , ou une prolepse ?Justifiez votre réponse. 

  1. « et il me semblait que je me sentirais tiré par les pieds tout au fond de cette eau noire ». A quel temps et à quel mode est le verbe souligné ? Quelle est sa valeur ?
  1. (…) un brouillard blanc très épais qui rampait sur l'eau fort bas. Relevez les expansions du nom » brouillard » et indiquez leur classe grammaticale. 
  1. Comment le narrateur tente-t-il d’expliquer sa peur ?   
  1. Selon vous, le narrateur a-t-il raison d’avoir peur ? Pourquoi ? Quels termes montrent que tout semble se passer dans son imagination ?  
Production écrite

 Il t’est arrivé d’éprouver une grosse peur. Dans  quelles circonstances ? Qu’elle en a été la cause ? Raconte , en une vingtaine de lignes, en  montrant que cette peur n’était que le fruit de ton imagination.

le cadre 

  1. Il s’agit d’un narrateur interne. Il est personnage principal du récit qu’il rapporte.
  1. Le narrateur se trouve dans une barque (« contre mon bordage » «  L'ancre tint bon » «ni mon bateau » ). L’événement se déroule sur un fleuve (« je ne voyais plus le fleuve »), en pleine nuit  , une nuit de lune (« la plaine toute pâle de la lumière de la lune »). Le fleuve traverse un paysage de campagne (« la plaine », « des groupes de peupliers »)         
  1. Les éléments qui rendent l’atmosphère inquiétante sont
  • le mystérieux bruit qui « sonna au bordage » du bateau
  • la nuit
  • le brouillard qui enveloppait la rivière   et la plaine
  • les silhouettes sombres « des groupes de peupliers » qui formaient des « taches noires qui montaient vers le ciel
  • et surtout l’immobilité du bateau qui n’avançait plus retenu par l’ancre que le narrateur ne parvenait pas à remonter ( « Je saisis ma chaîne et je me raidis dans un effort désespéré. L'ancre tint bon. Je me rassis épuisé. »)
  1. La couleur dominante est le blanc . Le champ lexical du blanc :  « pâle »,  « la lumière »,  « coton »,  «  blancheur ».                                              

La montée de la peur

  1. « soudain » est un adverbe ; « sonna » est un passé simple.

Ces deux mots annoncent un événement imprévu, celui-là même qui provoque la peur.

  1. expressions traduisant la montée de la peur
  • une  étrange agitation nerveuse

  • il me venait des imaginations fantastiques

  • j'éprouvais un malaise horrible

  • cette idée me fit frissonner d'épouvante

  • Cet effroi bête et inexplicable grandissait

  • devenait de la terreur.

  1. L’événement qui est à l’origine de cette peur est un mystérieux « bruit » qui « sonna au bordage ».   
  1. Ces  « imaginations fantastiques » sont provoquées par « un brouillard blanc très épais ».

Le narrateur ne voit plus rien. Il précise : « je ne voyais plus le fleuve, ni mes pieds, ni mon bateau, mais j'apercevais seulement les pointes des roseaux, puis, plus loin, la plaine toute pâle de la lumière de la lune, avec de grandes taches noires qui montaient dans le ciel »

  1. Comme son bateau était immobilisé, il pensait que s’il le quittait pour regagner la berge à la nage, il risquerait de se noyer .

« il y avait pour moi neuf chances sur dix de ne pouvoir me diriger dans ce brouillard et de me noyer, quelque bon nageur que je fusse. »      

La narration 

  1. le passage correspond à une prolepse (anticipation)/ Le narrateur imagine ce qui lui arriverait s’il quittait le bateau pour fuir à la nage          
  1. «  je me sentirais » : conditionnel présent à valeur temporelle (futur du passé)   
  1. « un brouillard blanc très épais qui rampait sur l'eau fort bas », les expansions de « brouillard »

« blanc » et « épais » : deux adjectifs qualificatifs

« qui rampait sur l’eau fort bas » : proposition subordonnée relative.

  1. Le narrateur, qui tente en vain de se raisonner, explique : « il y avait en moi autre chose que ma volonté et cette autre chose avait peur ».

Il y a en lui un « moi brave » et un « moi poltron ». Ainsi, il y aurait « deux êtres qui sont en nous, l'un voulant, l'autre résistant ».

  1. Le narrateur ne sait pas vraiment s’il a raison d’avoir peur. Les lieux sont inquiétants, mais de nombreux verbes (« figurais », « semblait ») montrent que son imagination lui joue des tours. Le lecteur hésite.

Au reste, cette dualité, ces « deux êtres » ne laisse  pas d’inquiéter...  

Production écrite

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